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COMITE SOCIAL ET ECONOMIQUE
COMITE SOCIAL ET ECONOMIQUE

Un accord de GPEC ne vaut pas une bonne consultation ponctuelle du CSE

Publié le 25 septembre 2023
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Par Sarah Martin d’Escrienne

Les mesures ponctuelles « de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs » sont soumises à la consultation du CSE « quand bien même elles résulteraient de la mise en œuvre [d'un] accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ».

L'article L.2312-14 du Code du travail prévoit à son troisième alinéa que « les entreprises ayant conclu un accord relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences [GPEC] ne sont pas soumises, dans ce domaine, à l’obligation de consultation du comité social et économique ».  Par ailleurs, selon les termes de l'article L.2312-8 du Code du travail, le CSE doit être consulté ponctuellement par l'employeur « sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise, notamment sur […] les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs ». Ainsi, il ne faut pas confondre la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, pour laquelle un accord peut suffire, avec sa traduction en mesures concrètes qui nécessite une consultation ponctuelle du CSE. Jusqu'où s'étend le « domaine » de la GPEC, mentionné à l'article L. 2312-14, qui dispense l'employeur de la procédure de consultation du CSE lorsqu'un accord a été signé ? La chambre sociale de la Cour de cassation répond à cette question dans un arrêt du 29 mars 2023, en se référant à l'effet utile rappelé par une directive européenne. Le juge précise ainsi le champ d'application de l'obligation de consultation ponctuelle.

Un « plan équilibre » arbitraire chez Thales

Le groupe Thales signe avec son CSE un accord « visant à favoriser le développement professionnel et l'emploi par des démarches d’anticipation ». Il s'agit d'un accord relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC). Plus tard, l'employeur décide de mettre en place un « plan équilibre ». Ce plan organise des mobilités affectant le volume des effectifs de deux départements et ne fait l'objet d'aucune consultation du CSE. N'ayant pas été consulté, le CSE d'un de ces établissements saisit le tribunal judiciaire pour faire cesser l'entrave de l'employeur. Ce dernier nie alors avoir causé un trouble manifestement illicite : puisqu'un accord de GPEC avait été signé, il n'était pas tenu de consulter le CSE de manière ponctuelle au sujet des mesures portant sur la gestion des emplois, telles que ce « plan équilibre ». Comme l'explique la Cour de cassation dans son arrêt, l'employeur confond ici la gestion prévisionnelle des emplois avec sa mise œuvre. Or, elles sont soumises à des consultations de natures différentes.

Sans consultation ponctuelle du CSE, pas de modification du volume des effectifs

Si, concernant l'anticipation de la gestion des emplois, la consultation peut être remplacée par un accord de GPEC (art. L.2312-14 C. trav.); il n'en va pas de même des mesures ponctuelles qui, impactant notamment le volume ou la structure des effectifs, ont une incidence sur la marche générale de l'entreprise (art. L.2312-8 C. trav.). En outre, la directive 2002/14/CE du Parlement européen et du Conseil rappelle qu'il convient d'interpréter les lois et les conventions « de manière à assurer l’effet utile de la démarche » d'information et de consultation. Or, le « plan équilibre » de Thales modifie les effectifs de l'établissement en mettant en œuvre des mobilités ; considérer que ces mesures ne nécessitent pas de consultation du CSE irait à l'encontre de l'effet utile. La chambre sociale se réfère donc à l'effet utile pour reconnaître que si le « plan équilibre » relève en effet de la gestion de l'emploi, il demeure soumis à l'obligation de consultation ponctuelle en ce qu'il est opérationnel. Peu importe, donc, que les mesures de ce plan concernent le domaine de la gestion de l'emploi et des compétences : il s'agit bien d'un projet ponctuel intéressant « l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise » au sens de l'article L.2312-8 du Code du travail. En d'autres termes, l'employeur ne peut pas se servir d'un accord de GPEC comme d'un subterfuge : il ne lui permet pas de contourner la consultation ponctuelle du CSE lorsqu'il prévoit de modifier le volume ou la structure des effectifs. L'employeur ne pouvait donc décider seul, sans avoir recueilli l'avis du CSE, de mettre en œuvre le « plan équilibre ». Une entrave au fonctionnement du comité social et économique est donc bel et bien caractérisée.

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