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HARCÈLEMENT
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Témoins de faits de harcèlement : une protection accrue !

Publié le 12 juin 2023
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La Cour de cassation opère un revirement de sa jurisprudence en élargissant la protection reconnue aux témoins de faits constitutifs de harcèlement dans le cadre du travail. Cette protection accrue permet d'être assuré contre tout licenciement ou mesure discriminatoire basé sur ce motif.

À l'origine, les juges exigeaient que le salarié relatant des faits constitutifs de harcèlement les qualifie en tant que tels pour bénéficier de la protection offerte par le Code du travail. Récemment, la Cour de cassation a opéré changement de cap louable (Cass. Soc. 19 avr. 2023, n°21-21.053).

La protection des salariés victimes et témoins de faits de harcèlement renforcée

Un salarié, victime ou témoin de faits constitutifs d'un harcèlement moral ou sexuel, bénéficie d'une protection particulière contre d'éventuelles représailles de son employeur. À ce titre, aucune victime ou témoin ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire ou d'un licenciement après avoir dénoncé ces faits à son employeur, qu'ils soient de nature à constituer un harcèlement moral (Art. L.1152-1 et suivants C. trav.) ou sexuel (Art. L.1153-1 et suivants C. trav.).

Dans une récente affaire, une salariée a saisi la justice pour contester son licenciement après avoir été victime de harcèlement moral. Ce licenciement fait suite aux dénonciations de ces mêmes faits par la salariée en question, bien qu'elle ne les ait pas qualifiés stricto sensu de harcèlement moral. La question est donc de savoir si un salarié relatant des faits constitutifs de harcèlement, sans les qualifier comme tels, peut tout de même bénéficier de la protection accordée par la loi.

La bonne foi du salarié dans l'exercice de sa liberté d'expression

À savoir : La mauvaise foi est caractérisée par la fausseté des faits dénoncés par le salarié (Cass. soc. 10 juin 2015, n°13-25.554).

Dans un premier temps, la Cour de cassation énonce qu'un licenciement d'un salarié témoignant de faits de harcèlement moral ne peut être licencié, sauf en cas de mauvaise foi. L'employeur n'est même pas contraint de mentionner celle-ci dans la lettre de licenciement. Il pourra la revendiquer devant le juge.

Dans un second temps, les juges de cassation rappellent que chaque salarié jouit d'une liberté d'expression dans son travail (Art. L.1121-1 C. trav. ; Art. 10 § 1 CEDH). Cette liberté d'expression doit être exercée normalement, c'est-à-dire eut égard à la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché. Tout licenciement prononcé en méconnaissance de ce principe est nul (Cass. soc. 16 fév. 2022, n°19-17.871).

Sur cette base, la Cour de cassation considère que si l'employeur ne conteste pas la bonne foi du témoignage du salarié, l'exercice non abusif de sa liberté d'expression lui donne une protection contre les mesures discriminatoires, notamment les licenciements. Tel est le cas dans la situation à l'origine du litige.

De fait, le salarié qui dénonce des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, peu importe qu’il ne les ait pas qualifiés comme tels dans sa lettre de dénonciation.

Un revirement de jurisprudence appréciable

À l’origine, chaque salarié devait qualifier les faits dont ils étaient témoins de harcèlement. À défaut, le salarié ne pouvait prétendre à la protection contre le licenciement et toute autre mesure discriminatoire basée sur ce motif (Cass. soc. Soc., 13 sept. 2017, n° 15-23.045).

Désormais, la qualification des faits litigieux n'est plus exigée. Ce nouveau principe jurisprudentiel est détaillé directement par la Cour de cassation sur la base de deux éléments essentiels : la bonne foi et l'exercice normal de la liberté d'expression.

Ce revirement est plus que bienvenue. Antérieurement, la position de la Cour de cassation pouvait engendrer des situations de discrimination injustes. Des salariés, de bonne foi, pouvaient dénoncer des agissements délictueux sans pour autant les qualifier de harcèlement par peur d'éventuelles représailles. Dès lors, ils pouvaient être directement victimes de mesures discriminatoires. Finalement, c'est le bon sens qui a primé au travers d'une extension de la protection des témoins de faits de harcèlement.

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