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DROITS DE GRÈVE
DROITS DE GRÈVE

Suspension de la réquisition à Total Normandie : le combat juridique continue !

Publié le 2 mai 2023
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La CGT des Industries chimiques et de Total Energies Plateforme Normandie ont réussi à faire suspendre la réquisition des raffineurs grévistes. La grève est garantie !

La réquisition dans la raffinerie de Gonfreville-l'Orcher : la casse du droit de grève

Les préfets disposent de pouvoirs exceptionnels de police leur permettant d'agir afin de restreindre l'exercice de droits et libertés. En cas d'urgence et d'atteinte constatée ou prévisible au bon ordre, à la salubrité, tranquillité et à la sécurité publique et que les moyens dont disposent le préfet ne permettent plus de poursuivre ses objectifs, ce dernier peut réquisitionner par arrêté tout bien ou toute personne nécessaire à un service (Art. L.2215-1 du Code général des collectivités territoriales).

Alors que le gouvernement de l'époque, ayant inscrit cette mesure en 2003, assurait que ce pouvoir serait réservé aux situations extrêmes (conflits militaires ou catastrophes naturelles), ce texte a été utilisé dès 2010 pour réquisitionner les personnels grévistes. De manière inquiétante, il a été abusivement utilisé récemment durant la mobilisation des raffineurs et son utilisation a d'ailleurs été validée par les juges (TA Rouen 13 oct. 2022 n° 2204100« La réquisition préfectorale contre les grévistes », 20 octobre 2022, NVO droits).

Le 3 avril dernier, le gouvernement, par l'intermédiaire de son préfet de Seine-Maritime, a pris un arrêté portant réquisition du personnel gréviste de la plateforme Total Energies de Gonfreville-l'Orcher pour les journées du 4 au 6 avril 2023. Les travailleurs se mobilisaient contre la réforme des retraites.

L'État justifie ces réquisitions par tout moyen dans le but de casser le mouvement de grève visant sa réforme.

L'administration assurait qu'avec le début des vacances scolaires et du week-end de Pâques, la circulation allait augmenter drastiquement en Île-de-France et dans le Centre-Val-de-Loire. Cette augmentation engendrerait des pénuries importantes de carburants dans ces deux régions.

Face à cette énième attaque, la Fédération CGT des industries chimiques (FNIC-CGT) ainsi que la CGT de Total Energies Plateforme Normandie saisissent le tribunal administratif de Rouen pour demander la suspension de l'arrêté dans le cadre d'une procédure rapide : le référé-liberté.

Le juge administratif comme garant du droit de grève

Pour limiter les pouvoirs exorbitants du préfet, le juge administratif peut suspendre des décisions administratives au nom de la sauvegarde d'une liberté fondamentale (Article L. 521-2 du Code de justice administrative).

Selon le juge des référés, le droit de grève est une liberté fondamentale. Toute mesure l'affectant nécessite un contrôle des juges.
À savoir Le juge des référés de l’ordre administratif statue en urgence pour protéger un droit ou une liberté dans le cadre d’un conflit avec l’administration. Il peut, dans certaines conditions, suspendre une décision administrative.

Le Tribunal administratif de Rouen réfute les arguments avancés par l'administration. D'une part, les vacances scolaires de ces régions ne débutent pas au même moment. De plus, le seul événement du week-end de Pâques n'est pas suffisant pour prouver une circulation anormale. D'autre part, l'administration ne donne aucun élément de preuve permettant de conclure à une détérioration importante de la distribution et de l'alimentation de carburants dans les différents sites. En l'absence de trouble avéré à l'ordre public, la mesure n'était pas nécessaire.

L'arrêté de réquisition des grévistes de Gonfreville-l'Orcher constitue donc une atteinte grave et manifestement illégale au droit de grève et est suspendu (TA Rouen, 6 avr. 2023, n° 2301355).

Une victoire de la bataille juridique opérée par la CGT !

Les réquisitions sont des mesures liberticides visant à casser les différents mouvements de grève. Lors de ses premières applications au début des années 2010, la CGT avait saisi le Comité de la liberté syndicale de l'Organisation Internationale du Travail. Le comité de l'OIT a bien rappelé que « les installations pétrolières ou encore la production, le transport et la distribution de combustibles ne constituent pas des services essentiels au sens strict du terme » (Rapport n° 362 – Point 1005, OIT, Nov. 2011). Ainsi, les réquisitions dans les raffineries sont contraires aux conventions internationales signées par la France.

En dépit des déclarations de l'OIT, les juges français n'ont jamais remis en cause l'utilisation des réquisitions dans le cadre des installations pétrolières. Les juges se limitent à vérifier la nécessité et la proportionnalité des arrêtés de réquisition. Face à ce choix opéré par les magistrats, la CGT a continué à mener une véritable bataille juridique contre tous les arrêtés de réquisition. La décision du 6 avril 2023 illustre la nécessité de ce combat.

Il est plus que nécessaire pour les travailleurs et la CGT de saisir le juge afin de faire suspendre ces décisions liberticides. Le juge opèrera son contrôle de l'arrêté et pourra être amené à le suspendre. L'idée est de pousser l'État dans ses retranchements et le contraindre à se justifier.

L'État ne souhaitant que mettre en péril le droit de grève des travailleurs, l'objectif est de contester devant le juge chaque arrêté de réquisitions afin de mettre en lumière les incohérences de ces décisions purement politiques.
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