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Suspension de la réforme de l’assurance chômage : quelles conséquences ?

Publié le 25 juin 2021
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Le gouvernement avait décidé contre l'avis unanime des organisations syndicales que de nouvelles règles d'indemnisation défavorables aux demandeurs d'emploi entreraient en vigueur le 1er juillet. Le Conseil d'État vient de le désavouer en suspendant certaines d'entre elles. NVO Droits vous explique.

Ne tenant aucun compte du fait que la crise sanitaire a aggravé la précarité et les suppressions d'emploi, le gouvernement avait remis sur les rails sa réforme régressive de l'assurance chômage contre l'avis unanime des organisations syndicales de salariés.

Le Conseil d'État vient de lui infliger le 22 juin dernier une claque monumentale en suspendant certains aspects de son projet de réforme. Selon lui, les incertitudes sur la situation économique ne permettent pas de mettre en place de nouvelles règles qui sont censées favoriser la stabilité de l'emploi en rendant moins favorable l'indemnisation du chômage des salariés ayant alterné contrats courts et inactivité. Et ce, alors que l'alternance de périodes d'activité et de périodes d'inactivité est le plus souvent une situation subie par les salariés.

Résultat : le nouveau mode de calcul de la durée d'indemnisation et du salaire journalier de référence (SJR) prévu par un décret du 30 mars 2021 ne rentrera pas en application le 1er juillet 2021. Pour bien comprendre le sens de cette décision et ses conséquences pratiques, un petit retour en arrière s'impose.

Des nouvelles règles d'indemnisation déjà sanctionnées…

Le Conseil d'État avait déjà annulé en novembre 2020 l'un des points les plus critiquables de la réforme de l'assurance chômage intervenue en 2019 pour rupture d’égalité entre les allocataires (CE 25 nov. 2020, no 434920). En effet, du fait du nouveau mode de calcul de la durée d'indemnisation et du salaire journalier de référence (SJR) servant de base au calcul des allocations, deux personnes ayant eu la même durée de travail et le même salaire auraient eu une allocation variant du simple au quadruple.

… mais remises en selle légèrement toilettées

Malgré cette décision, le gouvernement est resté droit dans ses bottes. Un décret du 30 mars 2021 a ainsi prévu de modifier le mode de calcul de la durée d'indemnisation et du SJR à compter du 1er juillet 2021. Alors que jusqu'à présent, seuls les jours travaillés étaient pris en compte, les périodes d’inactivité seraient également comptabilisées, à quelques exceptions près. Bien que ce texte ait été légèrement assoupli par un nouveau décret du 8 juin 2021, la conséquence reste identique : pour une même rémunération, l'indemnisation du chômeur ne serait pas la même selon qu'il aura eu un seul contrat de travail continu ou plusieurs. Plus ceux-ci seront espacés, plus le SJR baissera et l'allocation avec. Ce nouveau mode de calcul aurait également des retombées en ce qui concerne le cumul des allocations avec une activité professionnelle comme l'a montré une étude de l'Unédic commandée par la CGT.

Nouveaux recours des organisations syndicales

Tout cela a logiquement conduit la grande majorité des organisations syndicales de salariés à saisir le Conseil d'État d'une requête en annulation du nouveau texte adopté par le gouvernement car les tempéraments apportés ne règlent en rien les inégalités de traitement déjà condamnées par les juges.

Et comme il y a de sérieuses raisons de penser que le décret du 30 mars 2021 contient toujours des dispositions illégales, ils ont demandé en référé au Conseil d'État de suspendre l’exécution du décret du 30 mars 2021 en attendant qu'il se prononce sur le fond. En effet, la procédure du référé-suspension permet au juge administratif de suspendre l'application d'un texte s'il y a un doute sur la légalité de celui-ci et si l'urgence le justifie. Le Conseil d'État leur a donné raison le 22 juin en suspendant les dispositions relatives à la détermination du SJR (CE, ord. réf., 22 juin 2021, no 452210).

Que se passe-t-il en pratique le 1er juillet 2021 ?

La décision du Conseil d'État suspend l'exécution du décret du 30 mars 2021 mais seulement pour ce qui concerne les dispositions relatives à la détermination du salaire journalier de référence (SJR).

Cependant, cette suspension entraîne, par ricochet, celle d'autres dispositions qui ne peuvent pas s'appliquer en l'état car elles font référence à ce nouveau mode de calcul. Il en est ainsi notamment des règles relatives à la durée d'indemnisation et aux différés d'indemnisation. Sur ces différents aspects, ce sont donc les règles actuelles de la convention d'assurance chômage du 14 avril 2017 qui continuent de s'appliquer au-delà du 1er juillet 2021.

En revanche, à compter de cette date, d'autres dispositions issues du décret du 30 mars 2021 s'appliquent car le Conseil d'État a estimé qu'il n'y avait pas urgence à les suspendre. C'est notamment le cas de celles concernant l'ouverture des droits et la dégressivité des allocations qui s'appliquent toutefois dans une version temporaire issue de la crise sanitaire.

Le tableau ci-dessous résume les principales règles qui s'appliquent au 1er juillet 2021. Celles-ci ne concernent que les salariés dont la fin de contrat de travail intervient à compter du 1er juillet 2021 ou dont la procédure de licenciement est engagée depuis cette date (jour de l'entretien préalable ou date de présentation de la lettre de convocation à la première réunion des instances représentatives du personnel en cas de grand licenciement économique). Les autres continuent de bénéficier de l'ensemble des règles plus avantageuses issues de la convention d'assurance chômage du 14 avril 2017 (voir RPDS 2017, no 871, p. 367).

À noter. Dans quelques mois, le Conseil d'État se prononcera sur le fond du recours des organisations syndicales contre l'ensemble des dispositions du décret du 30 mars 2021. Il serait incompréhensible qu'il se déjuge en faisant prévaloir les préoccupations économiques sur les nécessités sociales.
Assurance chômage : ce qui s'applique au 1er juillet 2021 (1)
DispositionRègleCommentaire
Ouverture des droitsAvoir travaillé au moins 4 mois
(88 jours ou 610 heures) au cours des 28 derniers mois (36 derniers mois pour les salariés de 53 ans et plus).
6 mois (130 jours ou 910 heures) quand les deux conditions suivantes seront réunies :
- le nombre cumulé de déclarations préalables à l'embauche, pour des contrats de plus d'1 mois hors intérim, doit être supérieur à 2 700 000, sur une période de 4 mois consécutifs ;
- le nombre de demandeurs d'emploi inscrits auprès de Pôle emploi dans la catégorie A, doit diminuer d'au moins 130 000 sur une période de 6 mois.
Droits rechargeablesAvoir travaillé au moins 4 mois soit
88 jours travaillés (ou 610 heures),
6 mois (130 jours ou 910 heures) en cas d'amélioration de la situation de l'emploi selon les critères indiqués ci-dessus
Dégressivité des allocationsL'allocation journalière d'un montant supérieur à 84,67 € est affectée d'un coefficient de dégressivité. Celui-ci s'applique à partir du 244e jour d'indemnisation (soit après 8 mois)Le coefficient de dégressivité.
Il s'appliquera à compter du 7e mois s'il est constaté une amélioration de la situation de l'emploi comme évoqué ci-dessus.
Durée d'indemnisationNombre de jours travaillés (maximum 5 par semaine civile) multiplié par le coefficient 1,4 ce qui donne un nombre de jours de versement de l'allocation sur une base calendaire (dans la limite de 730 jours pour les moins de 53 ans, 913 jours entre 53 ou 54 ans, et 1 095 jours à partir de 55 ans).Règle issue de la convention de 2017 en raison de la suspension par le Conseil d'État du nouveau mode de détermination de la durée d'indemnisation.
Salaire de référenceRémunérations habituelles du salarié au cours des 12 derniers mois précédant le dernier jour travaillé et payé.Règle issue de la convention de 2017 en raison de la suspension par le Conseil d'État du nouveau mode de calcul du salaire de référence.
Salaire journalier de référenceLe montant du salaire de référence est divisé par le nombre de jours travaillés durant la période de référence (dans la limite de 261 jours). Puis on multiplie ce résultat par 1,4 qui correspond au quotient de 7 jours sur 5 pour convertir ce nombre sur une base calendaire.Règle issue de la convention de 2017 en raison de la suspension par le Conseil d'État du nouveau mode de calcul du salaire journalier de référence.
Différé d'indemnisation congés payésMontant de l'indemnité compensatrice de congés payés versée par le dernier employeur divisé par le salaire journalier de référence.Règle issue de la convention de 2017 en raison de la suspension par le Conseil d'État du nouveau mode de calcul du salaire journalier de référence, ce qui aurait des incidences sur le calcul du différé.
(1) En prenant en compte les mesures applicables au 1er juillet 2021 qui ne sont pas suspendues par le Conseil d'État mais qui sont assouplies temporairement en raison de la pandémie de Covid-19 (conditions d'ouverture des droits et dégressivité des allocations).