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LICENCIEMENT POUR MOTIF ÉCONOMIQUE
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Ruptures conventionnelles : elles comptent pour le plan social !

Publié le 27 avril 2022
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C'est un principe important qui vient d'être rappelé par la Cour de cassation : faire signer des ruptures conventionnelles individuelles dans un contexte de difficultés économiques ne permet pas à l'employeur d'échapper au plan de sauvegarde de l'emploi. Un arrêt salutaire décrypté par NVO Droits.

Un employeur peut-il recourir aux ruptures conventionnelles individuelles (RCI) pour supprimer des postes au motif que l'entreprise est en difficulté ? Oui, sur le principe. Mais une limite vient d'être rappelée par la Cour de cassation dans un arrêt du 19 janvier 2022 (n° 20-11962) : lorsque les RCI conclues atteignent un certain nombre, l'employeur doit établir et mettre en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE).

La rupture conventionnelle individuelle, comment ça marche ?

Ni licenciement, ni démission. Depuis 2008, il existe une troisième voie de rupture du contrat de travail : l'employeur et le salarié en CDI peuvent conclure une RCI, à condition de respecter une certaine procédure. Après la convocation du salarié à un entretien préalable, la convention de rupture doit être rédigée sur formulaire Cerfa, soumise à la Dreets (Direction régionale du travail) pour validation. Quelle que soit son ancienneté dans l'entreprise, le salarié a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure à l’indemnité légale de licenciement.

Dès l'instauration des ruptures conventionnelles s'est posée la question de leur utilisation au sein d'entreprises en difficulté économique. Un employeur peut-il recourir à ce dispositif pour supprimer des emplois ? Réponse en demi-teinte des juges : conclure des RCI est possible mais la législation sur les licenciements économiques s'applique.

Contexte de difficultés économiques et de suppressions d'emploi

À l'origine de l'arrêt du 19 janvier dernier, les faits sont les suivants. Une société de presse, en difficulté économique, est cédée à un groupe. Dans le cadre de cette restructuration, un journaliste est licencié pour motif économique après avoir refusé une mutation géographique. Il saisit le juge pour demander la nullité de son licenciement, au motif de l'employeur aurait dû mettre en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE). Le plan de réorganisation de l'entreprise faisait en effet apparaître une douzaine de postes supprimés, compensés par une dizaine de ruptures conventionnelles intervenues au cours des 2 mois précédant l'engagement de la procédure de licenciement.

Or, selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation, les ruptures conventionnelles individuelles doivent être assimilées à des licenciements lorsqu'elles sont utilisées pour supprimer des emplois dans une entreprise en difficulté. Conséquence, dans les entreprises de 50 salariés au moins, l'employeur doit établir un plan de sauvegarde de l'emploi lorsque les RCI (cumulées ou non à des licenciements) atteignent un certain nombre (Cass. soc. 9 mars 2011, n° 10-11581).

À savoir : Obligation d'établir un PSE : à partir de quand ?Lorsque, dans une entreprise de 50 salariés au moins, un certain nombre de licenciements pour motif économique sont prononcés sur une certaine période, la mise en œuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi est obligatoire. Pour effectuer le décompte des licenciements, il faut y assimiler les éventuelles RCI conclues sur la période. Les seuils sont les suivants :
→ Au moins 10 licenciements sur une même période de trente jours (art. L. 1233-61 C. trav.).
→ Lorsque l'entreprise a procédé pendant 3 mois consécutifs à des licenciements économiques de plus de 10 salariés, un PSE est obligatoire pour tout nouveau licenciement économique envisagé au cours des 3 mois suivants (art. L. 1233-26 C. trav.).
→ Lorsqu’une entreprise a procédé au cours d’une année civile à des licenciements économiques de plus de 18 salariés au total, un PSE est obligatoire pour tout nouveau licenciement économique envisagé au cours des 3 premiers mois de l’année civile suivante (art. L. 1233-27 C. trav.).

L'employeur rappelé à ses obligations

Dans cet arrêt du 19 janvier 2022 (n° 20-11962), la Cour de cassation réaffirme sa jurisprudence. Les juges constatent que les ruptures conventionnelles conclues au sein de l'entreprise de presse avaient une cause économique et s’inscrivaient dans un projet global et concerté de réduction des effectifs et de suppressions d'emploi. Elles devaient donc être prises en compte pour déterminer les obligations de l'employeur en matière de plan de sauvegarde de l'emploi.

À l'appui du raisonnement des juges, ces deux textes :

  • l'article 12 de l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail , selon lequel la recherche de solutions négociées pour rompre le contrat de travail ne doit pas « porter atteinte aux procédures de licenciements collectifs pour cause économique engagées par l'entreprise » ;
  • l'article Ierde la directive européenne n° 98/59/CE du 20 juillet 1998 relative aux licenciements collectifs : « Pour le calcul du nombre de licenciements […], sont assimilées aux licenciements les cessations du contrat de travail intervenues à l’initiative de l'employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne des travailleurs, à condition que les licenciements soient au moins au nombre de cinq ».

En l'absence de plan de sauvegarde de l'emploi – alors que ce dernier était obligatoire – le licenciement du salarié est sanctionné par la nullité. Deux conséquences possibles, au choix de l'intéressé (art. L. 1235-10 et suivants C. trav.) :

  • il demande sa réintégration au sein de l'entreprise, pourvu qu'elle soit possible ;
  • il demande à être indemnisé, l'indemnité pour nullité du licenciement ne pouvant être inférieure à la somme 6 derniers mois de salaire.

 

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