À venir
Votre identifiant correspond à l'email que vous avez renseigné lors de l'abonnement. Vous avez besoin d'aide ? Contactez-nous au 01.49.88.68.50 ou par email en cliquant ici.
HAUT
NÉGOCIATION COLLECTIVESignature des accordsCondition d’audience
NÉGOCIATION COLLECTIVESignature des accordsCondition d’audience

Le référendum pour court-circuiter les syndicats majoritaires

Publié le 7 août 2017
Modifié le 16 août 2017
Par
Permettre y compris à l'employeur d'organiser un référendum pour faire désavouer les syndicats majoritaires ayant refusé de signer un accord collectif d'entreprise régressif pour les droits des salariés, c'est ce qu'envisage le gouvernement dans l'une des futures ordonnances.

La loi du 8 août 2016 dite loi travail avait déjà prévu d'autoriser un référendum dans l'entreprise dès lors qu’un accord collectif n’est signé que par 30 % des représentants des salariés afin de court-circuiter les syndicats majoritaires représentants 50 % et plus des salariés. La loi habilitant le gouvernement à réformer le droit du travail par ordonnances souhaite encore aller plus loin pour forcer l'application des accords signés par une minorité de syndicats.

De la loi du 20 août 2008 à la loi du 8 août 2016

Jusqu'à l'intervention de la loi du 8 août 2016, pour être valable, un accord collectif d'entreprise ordinaire devait :
– avoir été signé par un ou plusieurs syndicats représentant 30 % des suffrages exprimés au premier tour des élections des titulaires du comité d'entreprise (de la délégation unique du personnel (DUP) ou à défaut des délégués du personnel (DP)) aux dernières élections professionnelles, quel que soit le nombre de votants ;
– ne pas faire l'opposition des syndicats représentant 50 % des suffrages exprimés dans les huit jours suivants la signature.

La légitimité des signataires, comme celle des opposants, était renforcée par le fait que, depuis la loi du 20 août 2008, leur représentativité doit être prouvée, notamment à travers leur audience aux élections professionnelles.
La loi du 8 août 2016, dite loi travail, a généralisé progressivement l'accord majoritaire et a rendu inutile le droit d'opposition.
Pour être valable, un accord d'entreprise doit désormais être signé par l'employeur et les organisations syndicales représentant plus de 50 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations représentatives au premier tour des élections des titulaires. La majorité d'engagement de 50 %, plus exigeante, renforce la légitimité des signataires de l'accord. Mais l'importance accordée à la force de la signature syndicale est contredite par le fait qu'en l'absence de majorité, les organisations signataires représentent plus de 30 % des suffrages, peuvent demander à l'employeur d'organiser une consultation des salariés visant à faire valider l'accord (art. L. 2232-12 modifié du Code du travail). Les signataires minoritaires peuvent donc passer en force en faisant valider le texte par les salariés.
A noter que ces règles sont applicables depuis le 10 août 2016 aux accords de préservation ou de développement de l'emploi ; depuis le 1er  janvier 2017, aux accords portant sur la durée du travail, le repos et les congés ; et au plus tard au 1erseptembre 2019, à tous les accords collectifs d'entreprise.

De la loi travail au projet d'ordonnance

Selon la loi d'habilitation, le gouvernement est autorisé par voie d'ordonnances à favoriser les conditions de mise en œuvre de la négociation collective en facilitant le recours à la consultation des salariés pour valider un accord, à l'initiative d'un syndicat représentatif dans l'entreprise, de l'employeur ou sur leur proposition conjointe. La faculté de demander l'organisation d'un référendum qui appartenait jusqu'alors aux seuls syndicats signataires minoritaires sera donc également l'apanage du chef d'entreprise. Cela reviendrait à donner les pleins pouvoirs à l'employeur, qui, on peut s'en douter, ne s'en privera pas, même au risque d'être désavoué.
Comme cela n'est pas suffisant, le gouvernement est également autorisé à modifier les modalités d'appréciation du caractère majoritaire des accords. Il pourrait aussi aménager le calendrier et les modalités de généralisation de ce caractère majoritaire ce qui devrait conduire à une accélération du calendrier prévu par la loi travail.
Le gouvernement est muet sur qu'il faut entendre par « modifier les modalités d'appréciation du caractère majoritaire des accords ». Notons qu'il va être difficile de faire pire que le dispositif actuel dans la mesure où les 50 % des suffrages exprimés nécessaires au caractère majoritaire de l'accord sont calculés sur les seuls suffrages s'étant portés sur les organisations représentatives et non sur l'ensemble des suffrages exprimés, donc sur une base potentiellement plus étroite. De quoi relativiser le renforcement du dialogue social annoncé puisque tout va être mis en œuvre pour contourner des syndicats majoritaires qui ne souhaiteraient pas signer un accord trop défavorable aux salariés.

Pour en savoir plus sur le sujet, lire aussi  :

L'accord d'entreprise primerait toujours sur le contrat de travail
L'accord d'entreprise, support de la régression des droits
Des ordonnances au pas de course
Casse sur ordonnances