Mauvais équilibre
Le Code du travail ne comportait pas jusqu'alors d'obligation sur l'égalité des sexes dans les candidatures. L'article L. 2324-6 déclarait timidement : « Lors de l'élaboration du protocole d'accord préélectoral, les organisations syndicales intéressées examinent les voies et moyens en vue d'atteindre une représentation équilibrée des femmes et des hommes sur les listes de candidatures ».
La loi du 17 août 2015 relative au dialogue social a entendu mettre en place une représentation équilibrée entre hommes et femmes lors de la composition des listes de candidats. Cette nouvelle obligation concerne l'ensemble des élections (comité d'entreprise, délégation unique, regroupement des institutions). Elle est applicable depuis le 1er janvier 2017 à tout engagement d'un processus électoral qui débute par la convocation des syndicats intéressés à la négociation du protocole préélectoral.
En pratique, cette disposition, censée aller dans le sens de l'égalité hommes/femmes, va souvent conduire à de très grandes difficultés de constitution de listes pour les organisations syndicales qui ont déjà beaucoup de mal à trouver des candidates et des candidats. Elle peut même inciter les organisations syndicales à accepter la délégation unique du personnel ou un accord sur un regroupement des institutions car il n'y aura alors plus qu'une seule liste à constituer. Un risque de fragilisation de la présence syndicale s'en ressentira, sans pour autant répondre au problème de fond que constituent les raisons d'une moindre implication des femmes dans les institutions représentatives du personnel.
La constitution des listes en pratique
Selon l'article L. 2324-22-1 du Code du travail, pour chaque collège électoral, les listes comportant plusieurs candidats doivent être composées alternativement d’un nombre de femmes et d’hommes correspondant à la part de femmes et d’hommes inscrits sur la liste électorale.
Si ce calcul n’aboutit pas à un nombre entier de candidats à désigner pour chacun des deux sexes, il est procédé à un arrondi arithmétique comme suit :
- arrondi à l’entier supérieur en cas de décimale supérieure ou égale à 5 ;
- arrondi à l’entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à 5.
Exemple : si l'effectif de l'entreprise est de 58 salariés avec 18 femmes et 40 hommes, il y a 3 candidats titulaires et 3 candidats suppléants à élire au comité d'entreprise.
Le nombre de femmes devant figurer sur chaque liste est de : 3 x 18/58 = 0,93 arrondi à 1 titulaire et 1 suppléant.
Le nombre d'hommes devant figurer sur chaque liste est de : 3 x 40/58 = 2,06 arrondi à 2 titulaires et 2 suppléants.
En cas de nombre impair de sièges à pourvoir et de stricte égalité entre les femmes et les hommes inscrits sur les listes électorales, la liste doit comprendre indifféremment un homme ou une femme supplémentaire.
Ainsi, dans notre exemple, pour les 3 sièges de titulaire à pourvoir, la composition alternative de la liste devra être la suivante :
- soit une femme tête de liste puis deux hommes ;
- soit un homme tête de liste, puis une femme puis un homme.
L'accord préélectoral doit mentionner la proportion de femmes et d'hommes composant chaque collège électoral.
Des sanctions disproportionnées
S'il est saisi après les élections, le juge pourra annuler l’élection des candidats élus en surnombre s'il constate que les prescriptions relatives au nombre d’hommes et de femmes à présenter sur les listes de candidats n'ont pas été respectées.
Concrètement, le juge doit annuler l’élection des derniers élus du sexe surreprésenté en suivant l’ordre inverse de la liste des candidats (art. L. 2324-23 du Code du travail).
Si c'est la composition alternée des listes de candidats qui n'est pas respectée, l’élection du ou des élus dont le positionnement sur la liste de candidats ne respecte pas cette prescription est annulée.
Pas d'élection partielle
L'article L. 2324-10 du Code du travail envisage l'éventualité d'élections partielles aux cas de diminution importante du nombre des élus, ce qui peut se produire par suite de départs de l'entreprise ou de démissions du mandat successifs, ou encore par suite de restructurations avec déplacements de personnels. Par exemple l'élection partielle s'impose :
- lorsqu'un collège n'est plus représenté (ce qui suppose qu'il l'était jusqu'alors) ;
- ou lorsque le nombre des titulaires est réduit de moitié ou plus (ce qui suppose qu'il était complet à l'origine).
Mais même si l'une ou l'autre de ces conditions est remplie, le même article L. 2324-10 précise désormais que des élections partielles n'ont pas à être organisées par l'employeur si la vacance des sièges résulte de l'annulation de l’élection de membres du comité suite au non-respect par une liste de candidats élus des prescriptions relatives au nombre d’hommes et de femmes à présenter sur les listes de candidats ou de celles relatives à la composition alternée des listes de candidats. Il est inadmissible de permettre ainsi aux employeurs de priver les salariés, peu après l'élection et pour la durée du mandat, d'une représentation effective dans leur entreprise et des candidats de leur choix.
En revanche et à notre avis, la représentativité acquise lors du premier tour des élections n'est pas remise en cause par l'annulation de l'élection des candidats concernés car la représentativité est acquise pour toute la durée du cycle électoral (Cass. soc. 7 déc. 2016, n° 15-26855).