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Loi « Passe Sanitaire » : Quelles conséquences sur la relation de travail ?

Publié le 10 août 2021
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La loi du 5 août 2021 contraint les salariés travaillant dans des établissements recevant du public et le personnel soignant ou ceux travaillant avec des personnes vulnérables à présenter un passe sanitaire valide. NVO Droits décrypte ce texte qui suscite critiques et interrogations.

La loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire s'applique depuis le 9 août 2021 après validation de l'essentiel de ses dispositions par le Conseil constitutionnel. Parmi celles-ci figurent notamment l’obligation d'un passe sanitaire pour certains salariés ainsi qu'une obligation de vaccination pour le personnel soignant et ceux travaillant avec des personnes vulnérables. Dans les deux cas, le fait de ne pas répondre aux conditions posées par la loi peut avoir des conséquences sur le contrat de travail ou le statut des intéressés. NVO droits répond aux principales interrogations que suscite ce nouveau texte qui élargit le pouvoir disciplinaire de l'employeur et autorise la discrimination sur la base de l'état de santé des salariés.

 Quels travailleurs sont concernés par le passe sanitaire ?

A compter du 30 août 2021, la détention d'un passe sanitaire concerne les salariés, les bénévoles, les agents publics et autres personnes travaillant dans des établissements, lieux, services et évènements dont l'accès des participants, visiteurs, spectateurs, clients ou passagers est conditionné à la présentation du passe sanitaire. Il s'agit notamment  des salles de spectacle, cinémas, établissements sportifs couverts, musées, bibliothèques, restaurants (sauf restaurants collectifs d'entreprise), bars, cafés, établissements de santé (sauf situation d'urgence ou réalisation d'un dépistage de la Covid-19), transports publics interrégionaux (sauf cas d'urgence), magasins et centres commerciaux d'au moins 20 000 mètres carrés sur décision du préfet de département (décret n° 2021-1059 du 7 août 2021, JO du 8).

Toutefois, le même décret du 7 août précise que l'obligation de passe sanitaire pour les salariés est limitée aux activités qui se déroulent dans les espaces et aux heures accessibles au public et ne concerne pas les activités de livraison et les intervention d'urgence. A notre avis, le préparateur de commande dans l'arrière-boutique d'un magasin n'a donc pas d'obligation particulière.

Les travailleurs concernés devront présenter soit une certification de vaccination complète, soit un test négatif, soit un certificat de rétablissement à la suite d'une contamination par la Covid 19.

L'employeur devra habiliter nommément les personnes autorisées à contrôler le passe sanitaire pour leur compte et tenir un registre détaillant leurs nom, date d'habilitation et jours de contrôles effectués.

Que se passe t-il en cas de passe invalide ?

Si le salarié concerné ne présente pas les justificatifs, certificats ou résultats qu'impose la loi, deux cas de figure peuvent se présenter.

Le salarié peut choisir d'utiliser, avec l’accord de son employeur, des jours de repos conventionnels ou des jours de congés payés.

Si le salarié n'utilise pas des jours de repos conventionnels ou des jours de congés payés, l'employeur lui notifie, par tout moyen, le jour même, la suspension de son contrat de travail (ou de ses fonctions pour un agent public titulaire). Cette suspension s’accompagne de l’interruption du versement de la rémunération.

Le salarié est ainsi placé devant un faux choix : soit consommer immédiatement des jours non choisis de congés et donc renoncer à un repos futur acquis par son travail, soit renoncer temporairement à son salaire, étant entendu qu'il ne s'agit pas en l'espèce d'un arrêt de travail indemnisé par l'assurance-maladie.

Si la suspension du contrat de travail se prolonge au delà d’une durée équivalente à trois jours travaillés, l'employeur doit convoquer le salarié à un entretien afin d’examiner avec lui les moyens de régulariser sa situation. Parmi celles-ci figurent les possibilités d’affectation, le cas échéant temporaire, au sein de l’entreprise sur un autre poste non soumis à l'obligation de passe sanitaire.

Cette possibilité doit appeler les salariés et leurs représentant à la plus grande vigilance. En effet, certains employeurs indélicats pourraient en profiter pour procéder à des mutations qui n'auraient rien de temporaires et qui ne correspondrait pas forcément aux compétences et qualifications de la personne concernée, ce qui constituerait une sanction déguisée, voir discriminatoire car fondée sur l'état de santé.

Dans tous les cas de figure (prise de congés, suspension du contrat, mutation temporaire), la position dans laquelle se trouve le salariés doit prendre fin dès qu'il produit les justificatifs requis. Il n'en demeure pas moins que la loi octroie aux employeurs la possibilité d'avoir accès aux données de santé de leurs salariés et de suspendre ou de modifier unilatéralement les termes du contrat de travail qui les lie sur la base de ces données.

Information du comité social et économiqueDans les entreprises et établissements d’au moins cinquante salariés, l'employeur doit informer, sans délai et par tout moyen, le comité social et économique (CSE) des mesures de contrôle qu'il met en œuvre pour satisfaire aux obligations liées au Passe sanitaire. L’avis du comité social et économique peut intervenir après la mise en œuvre desdites mesures, au plus tard dans un délai d’un mois à compter de la communication par l'employeur des informations. Une nouvelle entorse au principe de la consultation préalable du CSE.

 L'employeur peut-il licencier ?

A noter La loi n'envisage pas l'hypothèse des procédures de recrutement. En conséquence, selon nous, un employeur ou un cabinet de recrutement qui subordonnerait l'embauche à la présentation d'un passe sanitaire commettrait une discrimination prohibée aussi bien par le code du travail (art. L. 1132-1) que par le code pénal (art. 225-1 et 225-2). Pour en savoir plus : voir RPDS n° 916-917, Août-Septembre 2021, « La lutte contre les discriminations » (à paraître début septembre).

Initialement, le projet de loi permettait à l'employeur de rompre le contrat de travail du salarié pour défaut de passe sanitaire. Le texte définitif ne l'autorise plus. De même, le Conseil constitutionnel a censuré la disposition qui permettait aux employeurs des salariés en contrat à durée déterminée (CDD) ou en mission d’intérim se trouvant dans la même situation de défaut de passe sanitaire, de rompre le contrat avant l’échéance prévue.

En conséquence, le salarié dont le contrat de travail serait rompu à la suite de la non présentation d'un passe sanitaire devrait s'adresser en référé au conseil de prud'hommes en exigeant sa réintégration. Le licenciement serait en effet nul car fondé sur une discrimination en raison de son état santé.

Si l'employeur entend se séparer d'un salarié ne pouvant présenter un passe sanitaire valide, il ne pourrait le faire que s'il dispose d'une cause réelle et sérieuse de licenciement. Ainsi, il doit justifier que l'absence prolongée du salarié désorganise l'entreprise et que cela nécessite son remplacement définitif par un salarié en CDI. Il peut aussi procéder à un licenciement pour motif économique à condition de justifier d'un motif économique valable et d'une suppression ou transformation d'emploi. Il devrait également respecter l'obligation de reclassement. Par contre un licenciement pour inaptitude médicale semble douteux dans la mesure où le salarié n'est pas malade et où la vaccination ne revêt aucun caractère obligatoire.

Personnel soignant ou travaillant avec des personnes vulnérables : obligation de vaccination

Le personnel soignant et ceux travaillant avec des personnes vulnérables devront être obligatoirement vaccinés à compter du 15 septembre 2021, sauf à présenter un certificat médical de contre-indication. Jusque-là, ils devront présenter un passe sanitaire valide comme évoqué ci-avant (test PCR, test antigénique ou autotest d'au plus 72 heures).

Toutefois, entre le 15 septembre et le 15 octobre 2021 inclus, ces travailleurs seront autorisés à exercer leur activité s’ils justifient de l'administration d'au moins une des doses requises dans le cadre du schéma vaccinal, sous réserve de présenter le résultat d'un test négatif PCR, antigénique ou autotest d'au plus 72 heures.

Si l'employeur ou l’agence régionale de santé constate qu’un salarié ne peut plus exercer son activité, il l’informe sans délai des conséquences qu'emporte cette interdiction d’exercer son emploi ainsi que des moyens de régulariser sa situation. Le salarié qui fait l’objet d’une interdiction d’exercer peut utiliser, avec l’accord de son employeur, des jours de repos conventionnels ou des jours de congés payés. A défaut, son contrat de travail est suspendu. Cette suspension s’accompagne de l’interruption du versement de la rémunération. Elle prend fin dès que le salarié remplit les conditions nécessaires à l’exercice de son activité. Elle ne peut être assimilée à une période de travail effectif pour la détermination de la durée des congés payés ainsi que pour les droits légaux ou conventionnels acquis par le salarié au titre de son ancienneté. Pendant cette suspension, le salarié conserve le bénéfice des garanties de protection sociale complémentaire auxquelles il a souscrit.

Lorsque le contrat à durée déterminée d’un salarié est suspendu, le contrat prend fin au terme prévu si ce dernier intervient au cours de la période de suspension.

Les salariés exerçant leur activité sans respecter l'obligation de vaccination seront sanctionnés en outre par une amende de 135 €. Les employeurs n'ayant pas contrôlé le respect de cette obligation seront redevable d'une amende de 1 500 € ou 7 500 € puis 9 000 € ou 45 000 € après trois verbalisations.

Autorisation d'absence pour la vaccinationLa loi du 5 août 2021 accorde une autorisation d'absence aux salariés et aux stagiaires qui se rendent aux rendez-vous médicaux liés aux vaccinations contre la Covid-19. Elle peut aussi leur être accordée s'ils y accompagnent le mineur ou le majeur protégé dont ils ont la charge. Ces absences ne doivent entraîner aucune diminution de rémunération. Elles sont assimilées à une période de travail effectif pour décompter la durée des congés payés, ainsi que pour les droits légaux ou conventionnels acquis par le salarié au titre de son ancienneté dans l'entreprise.

 

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