Interdiction de sanctionner les grévistes, sauf faute lourde
Cette affaire, qui opposait la société RTE à des salariés grévistes ainsi qu'au syndicat CGT des Mines et de l'Énergie, est l'occasion de rappeler un principe important qui protège l'exercice du droit de grève (Cass. soc. 10 fév. 2021, n°19-18903 et ss).
Pas de sanction dans l'exercice normal du droit de grève
Un salarié ne peut être sanctionné en raison de l'exercice normal du droit de grève (article L. 1132-2 du Code du travail).
L'employeur ne peut donc ni sanctionner, ni licencier un salarié parce qu'il a participé à un mouvement de grève.
Il ne peut prendre aucune mesure discriminatoire, notamment en matière de rémunérations, à son encontre. En aucun cas, l'employeur ne peut retenir une fraction de salaire correspondant à une durée supérieure à la durée de la grève.
Seule une faute lourde peut justifier la sanction d'un gréviste
Seule une faute lourde peut justifier une sanction disciplinaire à l'encontre d'un salarié gréviste. Cette règle est valable que la sanction prononcée soit un licenciement (article L. 2511-1 du Code du travail) ou une sanction moins forte, telle qu'un avertissement, une mise à pied ou autre (Cass. soc. 7 juin 1995, n°93-42789).
La faute lourde doit pouvoir être imputée personnellement au salarié. Elle suppose donc une participation personnelle et active du salarié aux faits illicites reprochés. À défaut de pouvoir prouver la participation personnelle du salarié, la faute lourde ne sera pas retenue.
En l'absence de faute lourde, toute sanction est interdite et sera frappée de nullité (article L. 1132-4 du Code travail).
La présence non autorisée dans un local électrique lors d'une grève ne constitue pas une faute lourde
Dans cette affaire, la société RTE avait adressé une lettre de reproches, puis un avertissement, à un salarié lui reprochant sa présence dans un local électrique à l'occasion d'une grève.
La société RTE a été condamnée à retirer les sanctions disciplinaires ainsi qu'à verser des dommages-intérêts aux salariés et au syndicat.
En effet, pour la Cour de cassation, comme la seule faute reprochée aux grévistes (présence non autorisée dans un local électrique) ne constituait pas une faute lourde, toute sanction était interdite.
Dans cette affaire, rien n'avait permis à la société RTE de prouver que les grévistes sanctionnés avaient personnellement pris part aux actions de coupure d'électricité ou à d'autres actes illicites…