Du mieux sur la négociation dans la fonction publique
L'ordonnance du 17 février 2021 a profondément modifié les règles de la négociation dans la fonction publique en autorisant, à certaines conditions, les accords collectifs à édicter des mesures réglementaires directement applicables aux agents.
Le décret du 7 juillet 2021 a précisé le nouveau dispositif, notamment sur le suivi des accords et la possibilité de les modifier ou de les dénoncer. Suite à un recours unitaire de la CGT, de la FSU et de Solidaires Fonction publique dénonçant l'exclusion des syndicats représentatifs non signataires, le Conseil d'État vient de leur donner partiellement raison par sa décision du 19 mai 2022 (n°456425). Un point d'appui pour faire de la négociation collective un droit au service de l'amélioration de la situation des agents de la fonction publique.
La modification des accords est ouverte à toutes les organisations syndicales représentatives majoritaires même si elles n'en sont pas signataires
– à la date de signature de l'accord, lorsque la révision intervient durant le cycle électoral au cours duquel l'accord a été signé ;
– ou à la date des dernières élections professionnelles, lorsque la révision intervient après le cycle électoral au cours duquel l'accord a été signé.
Selon l'ordonnance du 17 février 2021, un accord peut être modifié par un autre accord conclu dans le respect de la condition de majorité (art. L. 227-2 Code général de la fonction publique).
Le décret du 7 juillet 2021 a ensuite précisé en son article 8 que la révision de l'accord pouvait intervenir soit à l'initiative de l'autorité administrative ou territoriale signataire, soit de tout ou partie des organisations syndicales signataires représentant la majorité des suffrages exprimés.
Le décret du 7 juillet 2021 a donc ajouté une condition non prévue par la loi en imposant que les syndicats soient signataires de l'accord pour pouvoir prendre l'initiative de sa modification. Cela porte atteinte à la liberté syndicale et au droit de participation des travailleurs.
L'action du comité de suivi des accords est limitée
L'ordonnance du 17 février 2021 impose la mise en place d'un comité de suivi pour chaque accord conclu et restreint sa composition aux organisations syndicales signataires de l'accord et aux représentants de l'autorité administrative ou territoriale compétente (art. L. 227-1 CGFP).
Si ce comité de suivi est une obligation légale, la loi n'en précise pas pour autant les contours, renvoyant son organisation à l'accord lui-même qui doit prévoir les modalités du suivi (art. 5 du décret n°2021-904 du 7 juil. 2021).
Pour le Conseil d'État, l'instauration systématique d'un comité de suivi réservé aux syndicats signataires de l'accord n'affecte pas la liberté des organisations syndicales de signer ou non un accord. Le Conseil d'État n'invalide donc pas cette disposition.
Un rappel opportun pour éviter que l'administration n'utilise ces comités de suivi pour négocier à sa guise avec qui lui chante.
La dénonciation des accords reste réservée aux organisations syndicales représentatives signataires
L'ordonnance du 17 février 2021 restreint la dénonciation des accords aux parties signataires (art. L. 227-4 CGFP). Seules les organisations syndicales signataires de l'accord et majoritaires peuvent dénoncer un accord.
Sur ce point, le décret ne modifiant pas le texte légal, le Conseil d'État se contente d'acter la décision du Conseil constitutionnel qui avait jugé ces dispositions conformes à la Constitution (décision du 10 déc. 2021, n° 2021-956 QPC). Pour autant, ces mesures restent éminemment critiquables puisque, comme celles concernant la modification des accords qui ont, à juste titre, été censurées, elles peuvent aboutir à ce que seuls les employeurs publics aient la possibilité de dénoncer un accord. En somme, un pouvoir exorbitant reste confié à l'administration en la matière, ce qui altère sensiblement l'égalité des armes dans la négociation.
Le combat continue !