Diffusion de tracts syndicaux : un représentant syndical au CE peut aussi le faire
Dans une entreprise pharmaceutique, un accord de droit syndical prévoit une procédure de diffusion des tracts syndicaux sur la messagerie professionnelle. Dans la limite de six fois par an, le tract est scanné et envoyé au responsable des relations sociales, avec copie au DRH. Ce dernier a 48 heures maximum pour le renvoyer aux salariés.
L'entreprise décide de faire barrage à un tract dont la diffusion a été sollicitée par le représentant syndical au CE dans le respect de ces modalités.
On demande d'abord à l'intéressé de retirer un bandeau figurant sur la publication, puis sa hiérarchie le convoque pour en discuter, retarde de nouveau la diffusion, le menace d'une action judiciaire. Pour quel motif ? Il sort des limites de ses fonctions.
Selon l'employeur, reconnu coupable de délit d'entrave dès le tribunal correctionnel, le mandat du représentant syndical au CE (aujourd'hui au CSE) consiste à représenter son syndicat au sein de l'instance élue. Au sein de l'entreprise, dans les rapports avec la direction, seul le délégué syndical (DS) peut représenter le syndicat.
Une vision étriquée rejetée par les juges. Lesquels rappellent que :
- l'accord collectif en vigueur dans l'entreprise attribuait la transmission de tracts aux organisations syndicales, sans la réserver au DS ;
- selon le Code du travail, la faculté de distribuer des publications et des tracts syndicaux appartient à la section syndicale et peut être exercée par l'un quelconque de ses membres, dès lors que les modalités prévues sont respectées ;
- dans chacune des manifestations de l'action syndicale, le DS n'est pas l'interlocuteur syndical unique de l'employeur (Cass. crim. 9 avril 2019, n° 18-80921, Sté Astrazeneca).
Conclusion, dans cette affaire, le représentant syndical au CE n'est pas sorti de son rôle, mais a simplement agi en tant que mandataire du syndicat. Cet arrêt rappelle utilement que le délit d'entrave peut être rapidement constitué.