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DISCRIMINATIONS
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Action de groupe pour discrimination au travail : une procédure qui se cherche…

Publié le 8 octobre 2020
Modifié le 9 octobre 2020
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L'actualité des deux actions de groupe portées par la CGT, l'une pour discrimination syndicale chez Safran Aircraft Engines, l'autre pour discrimination envers les femmes à la Caisse d'Épargne Île-de-France, nous donne l'occasion de revenir sur cette procédure complexe.

Créée à l'origine en matière de droit à la consommation avant d'être étendue à la discrimination au travail par la loi justice du XXIe siècle du 18 novembre 2016, l'action de groupe connaîtra sa première décision judiciaire le 15 décembre prochain dans une affaire de discrimination syndicale opposant la CGT à Safran Aircraft Engines. Une seconde action implique la Caisse d'Épargne Île-de-France assignée au tribunal le 7 octobre dernier par la CGT pour discrimination envers les femmes.

Textes à connaître

Articles L. 1134-6 à L. 1134-10 du Code du travail

Articles 848 à 849-21 du Code de procédure civile

Faire cesser les discriminations collectives dans l'entreprise plutôt qu'indemniser les victimes

L'action de groupe vise à établir que plusieurs salariés (ou candidats à un emploi) d'une même entreprise subissent une discrimination directe ou indirecte fondée sur un même motif. Les motifs de discrimination sont ceux énoncés à l'article L. 1132-1 du Code du travail, tels que l'origine, le sexe, l'âge, la nationalité, les activités syndicales, etc.

L'objet premier de l'action de groupe est le rétablissement de la légalité, c'est-à-dire faire cesser les discriminations dans l'entreprise. En second lieu, l'action de groupe vise la réparation du préjudice subi par les victimes. Mais, pour les salariés, seuls sont indemnisables les préjudices subis à compter du démarrage de l'action de groupe, alors qu'en cas d'action individuelle pour discrimination, la réparation est intégrale. Les salariés devront donc intenter une action aux prud'hommes à l'issue de l'action de groupe s'ils souhaitent voir indemniser leurs préjudices antérieurs à celle-ci. Et ils devront à nouveau faire reconnaître la discrimination, car le juge prud'homal n'est pas lié par la décision rendue sur l'action de groupe.

Privilégier le « dialogue social » et éviter la judiciarisation de l'action

Les salariés ne sont pas à l'initiative de l'action de groupe, qui doit être engagée par une organisation syndicale représentative selon une procédure en deux temps. Une première phase obligatoire se déroule dans l'entreprise suite à la mise en demeure de l'employeur par le syndicat de faire cesser la discrimination. Cette étape de discussions entre l'employeur, les organisations syndicales représentatives et le comité social et économique vise à résoudre le problème par la voie du « dialogue social » pour éviter celle de la judiciarisation.

Ce n'est qu'au bout de six mois que le syndicat peut saisir le tribunal judiciaire (sauf si l'employeur rejette la demande du syndicat de faire cesser la discrimination, car, dans ce cas, le syndicat peut saisir immédiatement le tribunal sans attendre le délai de six mois). S'ouvre alors la seconde phase de la procédure : le juge, s'il reconnaît la discrimination, ordonne à l'employeur de la faire cesser, éventuellement sous astreintes, et il définit le périmètre du groupe discriminé, c'est-à-dire qu'il fixe les critères conditionnant le rattachement des salariés au groupe. Chaque salarié répondant à ces critères pourra alors adhérer individuellement à l'action de groupe et prétendre ainsi à des dommages-intérêts.

Peut mieux faire

Au final, l'action de groupe reste une procédure peu usitée du fait de sa complexité. Elle devait permettre de mieux saisir les discriminations collectives et d'améliorer l'accès au droit pour les victimes. Nous ne pouvons qu'appeler de nos vœux son évolution, à l'instar du Défenseur des droits (Avis du Défenseur des droits n° 20-01, 5 fév. 2020), afin qu'elle puisse remplir ces nobles objectifs.