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DISCRIMINATIONSReligion
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CJUE : interdire le port du voile est possible

Publié le 16 mars 2017
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Le mardi 14 mars dernier, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a rendu deux décisions qui laissent aux entreprises françaises souhaitant interdire le port du foulard islamique, et plus largement le port de signes religieux, politiques ou philosophiques, une certaine marge de manœuvre.

Peut-on interdire le foulard islamique dans une entreprise privée ? Question sensible dont la CJUE a été saisie, à travers deux questions préjudicielles, l'une posé par la Cour de cassation (voir NVO.fr, 26 avril 2015) et l'autre par son équivalent belge. La CJUE répond par l'affirmative en précisant les conditions.

Imposer la neutralité par une règle interne

Dans l'affaire belge, une salariée travaillant en tant que réceptionniste dans une entreprise fournissant des services de réception et d'accueil avait été licenciée en raison de sa persistance à porter le voile, malgré une règle interne (non écrite dans un premier temps) interdisant aux salariés le port de signes visibles de leurs convictions politiques, philosophiques ou religieuses. La question posée à la CJUE par la haute juridiction belge était la suivante: l'interdiction de porter un foulard islamique, découlant d'une règle interne générale, constitue-t-elle une discrimination directe au sens de la directive du 27 novembre 2000 ?

Réponse de la CJUE : l'interdiction du port du foulard découlant d'une règle interne interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux, ne constitue pas une discrimination directe fondée sur la religion. Elle peut toutefois constituer une discrimination indirecte si l'obligation en apparence neutre qu’elle prévoit désavantage en définitive des salariés appartenant à une religion particulière. Mais même dans ce cas, l'entreprise peut prouver que l'obligation est justifiée par un objectif légitime, et que les moyens de le réaliser sont appropriés et nécessaires (CJUE 14 mars 2017, C-157/15).

Répondre à l'exigence d'un client

Dans le litige français, une ingénieure d'études avait été également licenciée pour avoir refusé d'ôter son foulard islamique malgré la demande d'un client de ne pas avoir affaire à une salariée voilée. Licenciement que l'ingénieure estimait discriminatoire.

Avant de trancher, la haute juridiction avait demandé à la CJUE si le souhait d’un client d’une société de ne plus voir les prestations de services assurées par une salariée portant un foulard islamique, constituait une «exigence professionnelle essentielle et déterminante». L'existence d'une telle exigence permet aux entreprises d'établir des différences de traitement (art. L. 1133-1 du Code du travail).

Sous-entendu, les intérêts économiques de l'entreprise peuvent-ils prévaloir sur l'exercice d'une liberté individuelle dans l'entreprise?

Réponse de la CJUE : la volonté d'un employeur de tenir compte des souhaits d'un client de ne plus voir les services dudit employeur assurés par une salariée voilée ne saurait être considérée comme une exigence professionnelle essentielle et déterminante (CJUE 14 mars 2017, C-188/15).

Une entreprise française pourra néanmoins introduire dans son règlement intérieur un principe de neutralité, à condition qu'il soit justifié par la nécessité de protéger la liberté et les droits fondamentaux des autres salariés ou de garantir le bon fonctionnement de l'entreprise et que les restrictions soit proportionnées par rapport à l'objectif poursuivi (art. L. 1321-2-1 du Code du travail).