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GÉNÉRALITÉS

La sous-traitance et la prestation de service

Publié le 7 décembre 2023
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La sous-traitance et la prestation de service

Par Mouna Benyoucef, avocate associée, Hujé avocats

Le recours à la sous-traitance et à la prestation de service ne cesse de se développer depuis plusieurs décennies dans l'ensemble des secteurs d'activité économique. Il met à mal l'ancien modèle de l'entreprise unitaire chargée de l'intégralité du processus de fabrication d'un produit ou d'offre d'un service. Ainsi, en 2019, un quart des salariés exerçaient leur activité dans une entreprise développant une activité de sous-traitance pour des donneurs d'ordre (Dares Publication, 1er mars 2023).

La collectivité de travail se trouve désormais le plus souvent éclatée et soumise à des statuts sociaux distincts, les salariés des sous-traitants et prestataires de service bénéficiant généralement de conditions de travail et d'emploi moins favorables que ceux des donneurs d'ordre. Ces stratégies économiques permettent aux donneurs d'ordre d'externaliser les contraintes salariales associées à la prise en charge directe de l'activité (coût des ruptures de contrats, mise en place de représentants du personnel, etc.).

Une étude récente de la Dares révèle que les salariés d'établissements sous-traitants sont davantage exposés aux risques professionnels et aux accidents du travail (Dares Analyses n°14, fév. 2023). D'une part, les donneurs d'ordre ont tendance à externaliser les travaux les plus dangereux. D'autre part, la dépendance économique des sous-traitants à leur égard est souvent source d'une intensification du travail et d'une faible attention accordée aux mesures de prévention des risques professionnels.

Ces relations contractuelles d'entreprise sont très peu encadrées par le législateur. La seule limite consiste dans l'interdiction des opérations de prêt de main d'œuvre exclusif à but lucratif (art. L. 8241-1 C. trav.) et de marchandage (art. L. 8231-1 C. trav.). Mais de nombreuses exceptions à ces interdictions ont progressivement été introduites.

Par ailleurs, ces infractions sont définies de manière relativement large. Le juge a donc dû définir des critères pour distinguer une véritable relation de sous-traitance ou de prestation de service d'une opération de fourniture de main d'œuvre prohibée. Les éléments déterminants résident dans l'existence d'un savoir-faire spécifique de l'entreprise sous-traitante et dans le fait qu'elle conserve l'autorité sur son personnel.

La complexité des montages de prêt de main d'œuvre, le faible nombre de contrôles des administrations en charge de la lutte contre le travail illégal, et une interprétation souvent restrictive des juges convergent pour aboutir à une faible répression pénale des opérations illicites. Elles ont pourtant des effets économiques et sociaux délétères, tant en termes de précarisation des salariés illégalement mis à disposition, de minoration des cotisations sociales versées aux organismes de protection sociale ou encore de course à la moins-disance sociale entre entreprises.

Des actions civiles peuvent utilement être intentées contre les donneurs d'ordre et les sous-traitants, le cas échéant par une action en substitution des organisations syndicales. Les salariés victimes de fausse sous-traitance peuvent ainsi obtenir la reconnaissance du lien contractuel qui les unit au donneur d'ordre et la réparation de leur préjudice.

Sachez-le vite La sous-traitance et la prestation de service renvoient à des relations contractuelles par lesquelles une entreprise donneuse d'ordre confie à une autre entreprise le soin d'exécuter pour son compte tout ou partie d'une activité déterminée, en principe spécialisée. L'entreprise sous-traitante réalise cette activité sous sa propre responsabilité et avec le concours de sa propre main-d’œuvre.
Ces contrats entre entreprises se distinguent ainsi de ceux ayant pour objet exclusif le prêt de main d'œuvre. Ces derniers sont en principe interdits dès lors qu'ils sont conclus dans un but lucratif mais des dérogations ont été accordées s'agissant notamment du travail temporaire et du portage salarial.
Le travailleur d'un sous-traitant ou d'un prestataire de service réalisant une tâche pour le compte d'un donneur d'ordre demeure sous la subordination juridique de son employeur, l'entreprise sous-traitante. Le législateur a néanmoins mis à la charge de l'entreprise donneuse d'ordre des obligations visant à assurer la bonne application de certains droits des salariés auxquels elle recourt.
Les opérations de fausse sous-traitance et prestation de service, qui dissimulent en réalité un simple prêt de main d'œuvre à but lucratif, sont susceptibles de donner lieu à des poursuites pénales sur le fondement des délits de prêt de main d'œuvre illicite et de marchandage.
Les salariés victimes de ces opérations sont en outre fondés à saisir les juridictions prud'homales pour voir reconnaître l'existence d'un contrat de travail avec l'entreprise utilisatrice et/ou obtenir une indemnisation pour le préjudice subi lors du prêt illicite de main d'œuvre.
Afin de déterminer la légalité d'une opération de sous-traitance ou de prestation de service, les juges se fondent sur plusieurs critères selon la méthode dite du « faisceau d'indices ».