La médecine du travail
Par Delphine Breton, avocate au Barreau de Nantes
Le médecin du travail est chargé de différentes fonctions dont certaines peuvent paraître paradoxales : celle de prévention en matière de sécurité et de santé des travailleurs et celle de conseiller de l'employeur. Ceci, tout en respectant l'obligation des règles déontologiques de sa profession de médecin, notamment le secret médical et l'indépendance.
Autant dire que la profession de médecin du travail est un métier complexe et relativement méconnu. La multiplicité des missions et le manque de moyens attachés à la politique de santé au travail (et au droit du travail en général) a conduit cette profession à être de plus en plus délaissée par les étudiants en médecine. La pénurie de médecins du travail est aujourd'hui incontestable. Elle est à l'origine d'éventuels manquements à leurs obligations (notamment quant à l'organisation de visites médicales dans les temps) et aboutit au résultat de travailleurs de moins en moins bien suivis médicalement.
La seule alternative trouvée pour pallier la pénurie est la pluridisciplinarité. En effet, les services de prévention et de santé au travail disposent désormais d'une équipe diversifiée, avec, en plus du ou des médecins du travail, d'autres médecins (étrangers, étudiants, en cours de formation…), des infirmiers, des intervenants en prévention des risques etc., permettant aux médecins du travail en poste de déléguer certaines de leurs tâches aux membres de cette équipe. S'ajoute à cela une pression de plus en plus forte exercée sur les médecins du travail par les employeurs. Ces derniers ont notamment pris le pli d'attaquer leurs décisions devant les juges prud'homaux et devant les ordres disciplinaires des médecins. Leur responsabilité est accrue alors même que leurs obligations augmentent et que leurs moyens ne suffisent point.
Depuis 2002, le rôle du médecin du travail est conçu dans un sens plus large. La dénomination « médecine du travail » a été remplacée par « service de santé au travail », devenu ensuite « service de prévention et de santé au travail » avec la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail (entrée en vigueur le 31 mars 2022, article 40).
Le Code du travail, à l'article L. 4622-2, définit la principale mission des services de prévention et de santé au travail qui est « d'éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail. Ils contribuent à la réalisation d'objectifs de santé publique afin de préserver, au cours de la vie professionnelle, un état de santé du travailleur compatible avec son maintien en emploi. ».
Ces missions sont exercées principalement par le médecin du travail – « en toute indépendance », en coordination avec l'employeur, les membres du comité social et économique et les divers intervenants mentionnés à l'article L. 4644-1 du Code de du travail. C'est donc un relais des institutions représentatives du personnel, des services sociaux, du chef d'entreprise et de l'administration du travail.
Cependant, il faut rappeler que le médecin du travail est salarié de l'employeur ou du service de santé interentreprise. C'est l'employeur qui financera toute l'organisation et les missions du service de prévention et de santé au travail.