Les délais de consultation et d'expertise du CSE
Les attributions, même seulement consultatives, du comité social et économique (CSE) déplaisent aux employeurs qui souhaitent appliquer leurs projets le plus rapidement possible, qui plus est dans le cadre d'une économie financiarisée.
Lors des négociations sur la « sécurisation de l'emploi » en janvier 2013, le patronat a réussi à obtenir de certaines organisations syndicales majoritaires une limite aux moyens d'action des institutions représentatives du personnel. Si, à l'époque, leur information a pu apparaître renforcée par la création d'une base de données économiques et sociales (et aujourd'hui environnementales ou BDESE) le patronat a obtenu en contrepartie que les avis du comité d'entreprise soient rendus dans des délais contraints.
Les articles, issus des ordonnances de 2017, relatifs aux délais de consultations du comité social et économique énoncent aujourd'hui les mêmes principes que ceux en vigueur pour les comités d'entreprise depuis les lois du 14 juin 2013 et du 17 août 2015 : les consultations du comité social et économique, ainsi que les expertises auxquelles il peut recourir, sont encadrées dans des délais fixés par accord ou par la loi. À l'expiration de ces délais, le CSE est réputé avoir été consulté et avoir rendu un avis négatif.
La loi limite ainsi le temps imparti aux élus pour accomplir leur mission. Cet encadrement dans le temps de la procédure devant le CSE vise aussi à limiter la contestation des projets de l'employeur et, par là même les actions en justice. Il s'agit d'une double sécurisation juridique pour les entreprises. L'ordonnance du 22 septembre 2017 relative au comité social et économique a même supprimé le délai minimal de quinze jours dont disposait le comité d'entreprise pour rendre ses avis tout en réaffirmant que le CSE doit disposer d'un délai d'examen suffisant.
Le législateur n'a toutefois pu écarter le principe selon lequel le CSE doit pouvoir « exercer utilement sa compétence, en fonction de la nature et de l'importance des questions qui lui sont soumises », principe qui découle de la directive européenne de 2002 sur l'information-consultation des travailleurs. Il en résulte que, pour que la consultation produise un effet utile, le comité doit toujours recevoir une information pertinente et la plus complète possible dès la présentation du projet par l'employeur ou la mise à disposition des informations nécessaires aux consultations dans la BDESE.
En effet, le caractère complet et pertinent de l'information est une condition impérative, aujourd'hui comme hier, pour qu'un certain nombre d'exigences puissent être satisfaites : délai d'examen suffisant, dialogue devant s'instaurer entre le comité et l'employeur, etc. Elles doivent permettre aux juges d'apprécier le caractère éclairé de la consultation et donc de vérifier s'il n'a pas été porté atteinte à la prérogative essentielle du comité que constitue la consultation préalable. Nous analysons dans le présent article le dispositif applicable en précisant bien qu'il peut et doit être interprété, voire combattu, à partir de « l'effet utile » que le droit européen et le droit français imposent aux processus d'information-consultation des représentants des salariés.
En l'absence d'accord, ces délais sont fixés par le Code du travail à un mois, deux mois si le comité recourt à un expert, ou trois mois lorsqu'une ou plusieurs expertises ont lieu, dans le cadre d'une consultation concernant le CSE central et un ou plusieurs CSE d'établissement.
S'ils estiment ne pas disposer d'éléments suffisants d'information, les membres élus du comité peuvent saisir le président du tribunal judiciaire selon la procédure accélérée au fond afin qu'il ordonne la communication par l'employeur des éléments manquants. Mais la seule saisine du juge n'a pas pour effet de prolonger automatiquement le délai fixé par l'accord ou par la loi.
Ce n'est que si le comité démontre qu'il rencontre des difficultés particulières d'accès aux informations nécessaires à la formulation de son avis, que le juge peut décider la prolongation du délai prévu.
Lorsque le CSE décide de faire appel à un expert-comptable ou à un expert habilité, la durée de la mission d'expertise est fixée par un accord entre l'employeur et le comité, ou, à défaut d'accord, par décret.