Arrêt maladie : quel impact sur les congés payés ?
Depuis le début de la crise sanitaire, de nombreux salariés ont été placés en arrêt de travail. Malades du Covid, salariés vulnérables, « cas contacts », garde d'enfant lors du premier confinement… ces arrêts, parfois répétitifs, ont la particularité d'être prescrits pour une durée relativement longue. A l'approche du 31 mai, date butoir pour le décompte et le solde des jours de congés, ces questions reviennent souvent : acquiert-on des jours de congés durant un arrêt maladie ? Des arrêts maladie répétés ou de longue durée peuvent-ils priver les salariés de leurs 5 semaines annuelles de congés payés ?
Le Code du travail défavorable
Selon le Code du travail, seul l'arrêt de travail pour maladie professionnelle (ou accident du travail) est assimilable à du temps de travail effectif (article L. 3141-5 du Code du travail). Concrètement, si l'on s'en tient à la loi française, cela signifie que le salarié n'acquiert pas de congés payés pendant un arrêt de travail pour maladie non professionnelle. Cette règle, très pénalisante pour les travailleurs, n'est toutefois pas conforme au droit européen.
A savoirCertaines conventions collectives sont plus favorables que le Code du travail et prévoient l'acquisition de jours de congés payés pendant un arrêt de travail, peu importe la nature de la maladie.
Le droit européen plus protecteur
L’article 7 de la directive du 4 novembre 2003 prévoit que tout travailleur bénéficie d’un congé annuel payé d’au moins quatre semaines. Ce droit est inconditionnel, aucune restriction n’est prévue dans le texte. La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) en donne cette interprétation : tout salarié doit disposer d’un congé minimal de quatre semaines même en cas d’absence pour maladie, de quelque nature ou origine qu’elle soit (CJCE 20 janv. 2009, aff. C-350-06 ). Toujours selon les juges européens, « le droit au congé annuel payé de chaque travailleur doit être considéré comme un principe du droit social de l'Union revêtant une importance particulière, auquel il ne saurait être dérogé ». Les autorités nationales, et notamment la France, doivent donc se conformer à la directive du 4 novembre 2003 (CJUE, 6 nov. 2018, aff. C-619/16).
Invoquer le droit européen
Et le chômage partiel ? Autre conséquence de la crise sanitaire, de nombreux salariés ont été placés en activité partielle (ex-chômage partiel) depuis le début de la pandémie. Pour ces salariés, la totalité des heures chômées doit être prise en compte pour le calcul des droits aux congés payés. Le salarié placé en activité partielle acquiert donc chaque mois, au minimum, 2,5 jours de congés (art. R. 5122-11 du C. trav.). Depuis mars 2020, date du premier confinement, les salariés en CDI ont ainsi acquis trente jours ouvrables, soit cinq semaines de congés, quelle que soit la durée de mise en activité partielle. Exactement comme s'ils avaient travaillé sur toute la période.
Malgré ces règles protectrices des travailleurs posées par le droit européen, la jurisprudence française continue d'appliquer le seul Code du travail. Selon la Cour de cassation, sauf disposition conventionnelle, contractuelle ou usage plus favorable, un arrêt maladie n’est pas assimilé à du temps de travail effectif et ne génère donc pas de droits à congés (Cass. soc. 14 novembre 2018, 17-21.535).
En cas de litige sur cette question, c'est donc le droit issu de l'Union européenne qu'il faut invoquer. Le salarié, de préférence avec l'appui de son syndicat, peut envoyer une lettre recommandée à son employeur pour lui rappeler ce principe fondamental édicté par l’article 7 de la directive du 4 novembre 2003 et les arrêts de la CJUE : tout salarié, même ayant subi des arrêts maladie répétitifs ou un arrêt de longue durée, doit bénéficier de quatre semaines de congés payés au minimum.
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