Information et consultation du CSE pendant la crise du coronavirus
Une entorse au principe de la consultation préalable des élus du personnel.
Le Code du travail prévoit que le comité social et économique est préalablement informé et consulté sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise, notamment la durée du travail (art. L. 2312-8 C. trav., al. 1er et 5). Ce principe de la consultation préalable permet de concrétiser la mission du CSE qui est d'assurer une expression collective des salariés.
En principe, pour rendre son avis, le CSE dispose, à défaut d'accord, d'un délai d'un mois (deux mois en cas de recours à un expert) à compter de la mise à disposition par l'employeur des informations nécessaires à la consultation (art. R. 2312-6 et R. 2312-5 C. trav.).
Comme nous l'avons expliqué sur NVO Droits, l'ordonnance du 25 mars 2020 autorise les employeurs, jusqu'au 31 décembre 2020, à déroger unilatéralement à certaines règles du Code du travail relatives à la durée du travail. L'ordonnance du 1er avril 2020 permet aux employeurs qui utilisent ces dérogations de s'affranchir du principe de consultation préalable du CSE.
Information concomitante et avis renvoyé à plus tard
L'employeur qui use des possibilités de dérogation offertes en matière de durée du travail doit seulement en informer le CSE sans délai et par tout moyen. Cela signifie que le chef d'entreprise doit à minima informer le comité concomitamment à leur mise en œuvre.
L'avis consultatif du comité pourra être rendu dans le délai d'un mois à compter de cette information, donc à postériori.
Sont concernées par cette procédure particulière limitée dans le temps :
- les entreprises qui utilisent la possibilité d'imposer au salarié la prise de jours de repos (jours de RTT, jours de repos des salariés en convention de forfait, jours affectés sur un CET) ;
- les entreprises relevant de secteurs d'activité particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation et à la continuité de la vie économique et sociale (dont la liste doit être fixée par décret) et qui ont recours à au moins une des dérogations permises en matière de durée du travail : durée quotidienne maximale de travail pouvant être portée à 12 heures ; celle du travail de nuit à 12 heures ; temps de repos, entre 2 journées de travail, réduit à 9 heures ; durée maximale de travail hebdomadaire pouvant être portée à 60 heures ; remise en cause de droit de la règle du repos dominical.
Maintien du principe de la consultation préalable
Le principe de la consultation préalable du CSE continue de s'imposer pour toutes les questions qui relèvent de la marche générale de l'entreprise et notamment les conditions d'emploi, de travail et la durée du travail. C'est le cas notamment pour :
- les entreprises des secteurs qui ne figureront pas sur la liste les autorisant à utiliser les dérogations permettant d'allonger la durée du travail (voir ci-dessus) ;
- les entreprises où un accord permettant à l'employeur d'imposer la prise de congés payés n'a pas été conclu. Dans ce cas, les règles habituelles concernant la consultation du CSE sur les congés payés continuent de s'appliquer (voir notre article).
Qu'advient-il des consultations des comités sociaux et économiques qui étaient en cours lorsque la période de confinement a commencé ? En effet, comme nous l'expliquons au début de cet article, les CSE disposent pour rendre leur avis et à défaut d'accord, d'un délai d'un mois et de deux mois en cas de recours à un expert. Ces délais courent à compter de la mise à disposition par l'employeur des informations nécessaires à la consultation (art. R. 2312-6 et R. 2312-5 C. trav.). À l'expiration des délais, le CSE qui ne s'est pas prononcé est réputé avoir rendu un avis négatif (art L. 2312-16 C. trav.).L'ordonnance du 1er avril 2020 est muette sur ce point. À notre avis, les employeurs ne peuvent pas considérer que le CSE a rendu un avis implicite du fait de l'expiration du délai pendant la période de confinement. La procédure d'information-consultation doit être considérée comme suspendue dès lors que le chef d'entreprise n'a pas tout mis en œuvre pour réunir les élus du personnel (par visioconférence ou réunions téléphonées par exemple, ce qui est facilité par l'article 6 de l'ordonnance).Soulignons que la même ordonnance (art. 1er) suspend les processus électoraux déjà engagés dans les entreprises à compter du 12 mars 2020 jusqu'à une date fixée à trois mois après la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire. On ne voit pas pourquoi ce qui serait valable pour les élections dans l'entreprise ne le serait pas pour les processus d'information-consultation.
Coronavirus : l'employeur peut-il imposer la prise de jours RTT ?