Salariés protégés, un droit d'accès au dossier
Petite piqûre de rappel : les représentants du personnel et autres salariés dit « protégés » bénéficient, dans l’intérêt des salariés qu’ils représentent, d’une protection contre le licenciement. Ce licenciement doit être autorisé par l’inspecteur du travail, faute de quoi il ne peut avoir lieu. Lorsque l'employeur reproche une faute au salarié protégé, l’inspecteur du travail doit rechercher si cette faute est d’une gravité suffisante pour justifier le licenciement.
En application des articles R. 2421-4 et R. 2421-11 du Code du travail, l’inspecteur du travail doit procéder à une enquête, avec un entretien, au cours duquel le salarié peut se faire assister d’un représentant de son syndicat. Cette enquête est contradictoire, ce qui signifie que le salarié doit être informé des griefs de l'employeur. Et si des témoignages figurent au dossier, alors le salarié doit pouvoir connaître l’identité des personnes qui ont témoigné. Autre précision que vient de rappeler le Conseil d'État dans un arrêt du 19 juillet 2017, le salarié doit pouvoir prendre connaissance de l’ensemble des pièces produites par l'employeur à l’appui de sa demande, dans des conditions et des délais lui permettant de présenter utilement sa défense. Le fait qu’il soit susceptible de connaître le contenu de certaines de ces pièces n’exonère pas l’inspecteur du travail de cette obligation d’information. Seule exception, c’est seulement lorsque l’accès à certains de ces éléments peuvent porter gravement préjudice à leurs auteurs que l’inspecteur du travail peut limiter l’étendue de l’information donnée ; un cas rare en pratique.
Notre affaire portait sur une autorisation de licenciement donnée en mai 2011 pour un motif disciplinaire « tenant notamment à la souffrance au travail » des collaborateurs du salarié concerné. Pour faire valoir ses droits, ce dernier avait demandé à prendre connaissance des pièces produites par l'employeur à l’appui de sa demande de licenciement. Mais l’administration n’a pas donné suite. Or l’accès à ces documents constitue une garantie pour le salarié car il lui permet de préparer sa défense. Selon les juges, l’inspecteur du travail aurait du le laisser consulter librement ces pièces et en prendre copie, ou lui adresser une copie, le cas échéant sous forme dématérialisée. Le Conseil d'État confirme les décisions du tribunal administratif et de la cour d’appel : l’autorisation de licenciement délivrée par l’inspecteur du travail est annulée, ce qui implique le droit pour le salarié de retrouver son emploi.